Les momies de Faténaoué
SOURCES ÉCRITES
Le site de Faténaoué est situé dans la région de Témala-Voh, au nord-ouest de la Nouvelle Calédonie. La grotte dans laquelle on a retrouvé ces momies se trouve en altitude, à plus de 500 m de haut, et à environ 15 kilomètres de l’embouchure de la rivière Témala, dominant la vallée de Faténaoué.
Glaumont parle de la momification des chefs des îles Belep et de Grande-Terre. Ces pratiques funéraires sont réalisées dans les maisons. Il s’agit d’abord de réaliser des perforations dans la peau afin d’y insérer divers produits naturels permettant la préservation du corps. Ensuite, on procédait à un dessèchement du corps et on apprêtait aussi le corps en le parant de vêtements et en maquillant son visage.
Vincent fait mention vers 1890 du caractère contracté de la posture du corps ayant subi l’enfumage. Vincent précise que la momification a commencé à s’étendre et à toucher des personnes de statut social inférieur à la fin du XIXe siècle dans la région de Touho.
Sarasin observe des comportements similaires dans les îles Loyalty. Les momies sont placées dans recroquevillés, les genoux rapprochés du thorax et des épaules, dans des paniers en fibres végétales. Elles mesurent environ 70 cm de haut, et sont décrites telles que des « dry mummy with the skin hard et and parchment-like ».
En 2001, dans la région de Gomen, Gony est témoin de deux pratiques de momification différentes, utilisant toutes deux le fumage, mais se déclinant différemment en fonction du statut social de la personne décédée. Le processus destiné aux personnes faisant partie de l’élite de la population était complexe et avait lieu dans diverses localisations. On massait le corps avec des huiles végétales et évacuait les fluides corporels en appliquant de petites ouvertures sur le corps, puis, on le fumait. Le corps fumé était déplacé grâce à un panier dans une grotte isolée et en altitude. Puis, on déplaçait le corps dans un deuxième panier qui constituait la dernière demeure de la momie.
SOURCES ARCHÉOLOGIQUES
Un rapport écrit en 1938 et des photos prises dans les années 30 font référence à ces momies. D’autres clichés ont été pris depuis les années 30 et jusqu’à aujourd’hui, permettant pour les archéologues d’étudier la taphonomie du site de Faténaoué.
Les recherches mises en place en 2001 ont démontré que les restes humains n’ont subi aucun déplacement ou traumatisme post mortem.
Les fouilles de 2001 ont mis en évidence la présence de cordages situés aux pieds des deux individus. Chacun des corps reposait dans un panier, composé de trois éléments distincts rapportés par Balfet : un filet et des cordes en fibres de coco, et un cadre en tiges de vignes. Ces paniers n’étaient pas conçus dans le dessein de transporter les momies, mais dans celui de les contenir une fois placées dans la grotte.
Aux pieds des deux momies de Faténaoué, les fouilles et les analyses ont permis de mettre en exergue la présence de cinq autres individus, dont certains étaient calcinés voire carbonisés. Les corps sont ceux d’individus mâles et femelles si l’on se fie aux analyses des os coxaux. Il semblerait également que la majorité d’entre eux soit relativement âgées. Il semblerait que davantage d’ossements se trouvaient originellement dans la grotte, ce qui expliquerait la présence non pas de cinq, mais d’une dizaine d’individus, également placés dans des paniers.
La tradition orale ainsi que les preuves archéologiques mettent en relief la position foetale des momies. Cette coutume devait être pratiquée rapidement après la mort et la rigidité cadavérique. Cette position contractée permet de simplifier la dessiccation et d’encourager l’élimination des fluides de décomposition.
La position était maintenue par des cordages permettant d’empêcher le mouvement de décontraction musculaire. Lors de leur étude en 2001, les momies de Faténaoué sont alors partiellement rendues à l’état de squelette mais préservent de manière comparable certains tissus mous. Les corps présentent des os partiellement maintenus entre eux par les articulations, du fait du dessèchement de la peau rendue brune et extrêmement sèche. On constate au niveau du cou la présence à la fois de restes de peau et de muscles. Aucune partie du corps n’a été retirée. Les ongles et cheveux sont cependant absents, suggérant une dessiccation par exposition au soleil ou à la fumée.
A Faténaoué, on ne retrouve pas de traces de vêtements ni d’aucune sorte de maquillage couvrant la peau des momies. Cependant, les momies et les paniers étaient ornés de coquillages.
SOURCES ANTHROPOLOGIQUES
La plupart des informations dont nous disposons actuellement sur la momification dans l’espace Pacifique Sud nous sont parvenues grâce aux traditions orales.
Si les archéologues connaissent aussi bien le cas des momies de Faténaoué, c’est parce que les personnes Faténaoué avaient l’habitude de voyager de nombreux jours avant de trouver l’emplacement secret pour le rituel funéraire (crémation du corps et utilisation d’épines végétales pour percer le corps et retirer les fluides du corps).
Les défunts étaient transportés sur des poteaux de bois qui pouvaient atteindre plus de deux mètres de long, et sur lesquels étaient fumés les cadavres tels que des poissons ou de la viande.
Des ethnologues comme Vieillard, Deplanche, et Bourgarel mentionnent la présence de momies placées dans les arbres à Canala entre 1855 et 1867.
Bonnafont parle de corps déposés dans des abris rocheux en 1869. Sarrasin fait les mêmes observations au début du XXe siècle.
Enfin, d’autres études anthropologiques en Océanie plus contemporaines ont montré que le retrait de la peau est une pratique fréquente dans le cadre de la momification.
Mais il existe aussi des pratiques spécifiques à la Nouvelle-Calédonie telles que l’absence de prélèvement de parties du corps, la non-ouverture des thorax, ou encore le fait que les cous ne soit pas désarticulés délibérément. Il n’y a pas de volonté chez les peuples néo-calédoniens de rendre au cadavre une apparence vivante, comme ce peut être le cas dans les îles du détroit de Torres, ou avec les mannequins funéraires du Vanuatu.
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Références webographiques :
Jay Dobbin, “Micronesian Religions : an overview” from Encyclopedia.com, [En ligne], date de mise en ligne inconnue, consulté le 12 mars 2021, https://www.encyclopedia.com/environment/encyclopedias-almanacs-transcripts-and-maps/micronesian-religions-overview.
Valentin, Frédérique, and Christophe Sand, “Mummification of the Human Body as a Vector of Social Link: The Case of Faténaoué (New Caledonia)” in Archaeologies of Island Melanesia: Current Approaches to Landscapes, Exchange and Practice, ed. Mathieu Leclerc and James Flexner, vol. 51, ANU Press, 2019, Australie, pp. 165–178, [En ligne], mis en ligne le 07 août 2019, consulté le 13 mars 2021, https://www.researchgate.net/publication/342105795_Mummification_of_the_human_body_as_a_vector_of_social_link_The_case_of_Fatenaoue_New_Caledonia.